Le grain de la voix et le corpus sonore à l’ère de la matérialité numérique

Dernière mise à jour le 28 juin 2018

Christophe Ronveaux est maître d'enseignement et de recherche et Bernard Schneuwly, professeur ordinaire de didactique des langues, à la Faculté de psychologie et de sciences de l'éducation de l'Université de Genève.

«Imagine-t-on une médiation scolaire sans voix?» interrogeait Pierre Yerlès (1996). La question portait sur la mise en voix concrète du texte et invitait à (re)considérer l’importance de la lecture à voix haute dans le discours sur la lecture littéraire. À l’ère de la matérialisation numérique, ce projet d’outillage didactique au service de la lecture littéraire mérite d’être posé sur le métier à nouveau. Les supports numériques offrent de nouvelles possibilités souples, multimodales, de diffusion, de création, d’appropriation des textes littéraires.

Nous examinons les mises en voix de deux textes littéraires contrastés, disponibles sur le web. Nous comparons l’oralisation d’une fable de La Fontaine Le loup et l’agneau et d’une nouvelle de Lovay La Négresse et le chef des Avalanches.

La matérialisation numérique: un nouveau grain à moudre pour la lecture à voix haute

Nous visons à identifier ces nouvelles ressources et dresser une typologie des interprétations. La comparaison des lectures vocales pour un même texte vise à mettre en évidence les phonostyles (Goldman, Auchlin & Simon, 2009) et à identifier les variations et les convergences prosodiques concernant les diverses dimensions du texte. La comparaison des lectures vocales des deux textes vise à identifier le degré de stéréotypisation du texte patrimonial par rapport au texte de l’extrême contemporain.

Si Roger Chartier (1990) a bien montré que la lecture à voix haute n’a pas disparu avec l’avènement de la culture de l’imprimé, l’on peut déjà considérer, vu le nombre de lectures vocales à disposition pour les deux textes considérés, que la matérialisation numérique donne à la lecture à voix haute un nouveau grain à moudre.