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Raphaël Pasquini dessine un cercle vertueux entre récits de pratique et théories

Dernière mise à jour le 2 décembre 2013

Aux Presses de l’Université Laval, Raphaël Pasquini publie «Quand les récits de pratique enseignante parlent d’apprentissage». Le professeur formateur HEP, attaché à l’UER Enseignement, apprentissage et évaluation, signe un livre original qui articule, avec grâce et profondeur, des moments vécus dans la classe avec les regards théoriques que l’on peut en extraire.

Photo: Thomas Zoller

Le livre de Raphaël Pasquini, c’est d’abord huit récits, huit récits qui pourraient former la trame d’un recueil de nouvelles tant chacune des histoires possède une construction dramatique puissante et rigoureuse. Au travers de huit expériences vécues en classe se dessinent les contours d’un métier complexe et fascinant. Dans un jeu de miroirs inversés, les récits qui dressent le portrait d’élèves en situation – avec leurs révoltes, leurs silences, leurs questionnements – renvoient directement à l’enseignant, dans sa pratique mais aussi et surtout dans ses valeurs et ses croyances. Le lecteur se retrouve avec lui, au cœur de ses interrogations, de ses doutes, de ses choix, s’interrogeant aussi sur ce qu’il ferait à sa place.

Delphine, Zahi, Abdul et les autres

En effet, que répondre à la souffrance de Delphine qui déclare tout de go qu’elle voudrait que l’école n’existe plus? Comment intégrer à la classe Zahi, le jeune Irakien qui arrive d’un pays en guerre dans une Suisse paisible qui l’accueillera peut-être…? Quelle posture adopter face à Abdul qui veut devenir pilote d’avion, mais qui a développé une telle peur panique de l’évaluation qu’elle menace de saboter son rêve?

Chacun de ces moments pédagogiques vécus et décrits par l’auteur donne ensuite lieu à une analyse qui problématise le récit. «Le livre est original par le fait qu’il évite d’être tout entier dans le témoignage ou tout entier dans la théorie, explique Raphaël Pasquini. Je voulais livrer des récits de mes expériences, mais sans en rester là. En effet, si l’on veut comprendre la complexité de la réalité de la classe, il faut, tout en s’appuyant sur le vécu, formaliser l’expérience, l’inscrire dans une réflexion outillée théoriquement qui mette en valeur les enjeux pédagogiques inhérents à tout acte d’enseignement.»

Face à des élèves souvent fatigués de la forme scolaire

Revenant sur l’élaboration du fil rouge de ses récits, Raphaël Pasquini précise qu’il s’agissait d’abord pour lui de faire l’illustration de ce qui lui tient le plus à cœur: offrir les meilleures conditions possibles au développement et aux apprentissages de chaque élève. «Le postulat est évidemment celui de l’éducabilité, souligne-t-il, mais le récit a ce pouvoir particulier de renvoyer immédiatement à des individus à part entière, à des contextes spécifiques. À l’heure où l’on constate que les élèves sont souvent fatigués de la forme scolaire, de ce métier d’élève qui consiste à faire souvent les mêmes tâches de la même façon, il s’agit de toujours rappeler qu’on peut enseigner et apprendre autrement.»

La classe, formidable espace d’inventivité

«L’exigence, poursuit l’auteur, est de créer de nouveaux scénarios capables de valoriser chacun des élèves et pas seulement les bons éléments qui s’en tireront toujours, quelle que soit la méthode, quel que soit le maître. On peut infléchir son propre regard sur ses élèves si l’on fait l’effort de mieux comprendre et analyser dans quelles conditions se construisent les apprentissages.»

Alors que la profession se complexifie et se densifie toujours davantage, la marge de manœuvre de l’enseignant ne s’est-elle pas singulièrement réduite ? Le professeur formateur HEP ne le conteste pas, mais il tient aussi à rappeler que la classe demeure un lieu où beaucoup de choses formidables s’inventent et peuvent continuer à s’inventer.

Aller au bout de ses idées pédagogiques

«J’ai un profond respect pour la culture enseignante, dit-il, toutefois, je suis parfois frappé par un discours qui tend à décharger une part des responsabilités sur la classe. Quand cela va mal, c’est souvent la faute des élèves». Pour Raphaël Pasquini, la responsabilité de l’enseignant consiste toujours à se demander si l’on est allé au bout de ses idées pédagogiques, à remettre en question sa pratique, à se réinterroger sur les manières de donner vie à cet espace particulier qu’on appelle la classe.

Aujourd’hui, Raphaël Pasquini a quitté le terrain de l’enseignement obligatoire pour se consacrer entièrement à son métier de professeur formateur à la HEP. Auprès de ses étudiants, les futurs enseignants, il insiste sur l’importance d’accompagner leur travail en classe de traces écrites. «L’écriture permet de mettre à distance, d’enregistrer les réussites comme les épisodes déstabilisants. Je travaille avec eux sur l’importance de toute expérience - il n’y a pas de sotte expérience - mais aussi sur la nécessité d’être outillé pour réaliser l’articulation pratique et théorie. L’écriture renforce cette articulation, car elle permet à la fois de partager l’expérience et de l’inscrire dans une lecture théorique qui nourrit le métier.»

Une source d’inspiration pour les enseignants du terrain

Certains des étudiants de Raphaël Pasquini ont déjà lu son livre. Un livre évidemment dont les récits les interpellent. Ils interrogent par exemple leur professeur formateur sur le choix qu’avait fait celui-ci en laissant Zahi, le jeune Irakien, faire un travail en solo sur son pays, en cours de géographie, plutôt que de l’intégrer au groupe. N’était-ce pas une façon d’accentuer son statut particulier, de l’isoler davantage ?

Ces questionnements réjouissent Raphaël Pasquini. «On se retrouve dans une posture d’auteur. Les étudiants s’exposent,  partagent de vraies questions professionnelles qui interrogent déjà la complexité de la profession. Cette dimension est essentielle pour des enseignants qui sont seuls dans leur classe face à leurs interrogations». Le professeur formateur HEP souhaite bien sûr que son ouvrage soit aussi un soutien pour les enseignants en établissements. «J’ai conçu mon livre de façon à ce que les lecteurs y trouvent aussi des sources d’inspiration pour leur propre enseignement. C’est une autre manière pour moi de poursuivre ma contribution à la formation des acteurs de terrain.»

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