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Patrimoine littéraire et numérique

Dernière mise à jour le 3 juillet 2018

Brigitte Louichon est professeure des Universités à l'Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) d’Aquitaine à l'Université Bordeaux IV.

Il est d’usage de considérer que la révolution numérique pose des problèmes particulièrement aigus aux professeurs de lettres, car l’enseignement littéraire repose de manière principale et centrale sur le texte - ou le livre -, objet clos et tangible. Les formes hypertextuelles et multidimensionnelles de l’écrit numérique et les formes de lecture y afférant sont perçues par opposition comme fragmentées, labiles, discontinues (Becchetti-Bizot, 2012).

Je voudrais ici montrer que ces phénomènes sont, au moins partiellement, communs au processus de patrimonialisation des œuvres littéraires.

Je définis l’œuvre patrimoniale comme production passée et réception présente, comme «du passé dans le présent» (Louichon, 2012 et 2013). Si la production relève de l’unicité (un auteur, un texte, un livre), la présence contemporaine de l’œuvre peut se qualifier et se mesurer à partir de ce que l’œuvre génère en tant que discours et objets sémiotiques divers que je classe en 4 catégories:

  • Les adaptations (éditions, traductions, versions transmédiatiques)
  • Les hypertextes (parodies, transfictions)
  • Les métatextes
  • Les allusions

De l'unicité de l'œuvre à la pluralité d'objets

Ces «objets» sont le résultat d’opérations matérielles et intellectuelles. Ainsi, l’opération «édition» transforme un texte en plusieurs livres; l’opération «traduction» transforme un texte en plusieurs autres textes, eux-mêmes transformés en un ou plusieurs autres livres; l’opération «transfiction» (Saint-Gelais, 2012) extrait un élément fictionnel et l’inclut dans un nouveau texte, puis un nouveau livre ou dans un film; l’opération «métatexte» extrait un élément notionnel ou linguistique et l’inclut dans un autre texte ou une émission de radio; l’opération «allusion» superpose un texte absent et un texte présent ou un texte absent et une œuvre picturale, etc.

Dès lors qu’on la considère du point de vue du présent, l’œuvre patrimoniale n’est pas un texte et la clôture de l’œuvre relève plus d’une mystique que d’une réalité. L’œuvre est un texte escorté de l’ensemble (potentiellement infini) des objets sémiotiques divers et multimodaux (Lebrun, 2012) qu’elle génère.

Les écrans donnent à voir cette profusion, cette dissémination, cette fragmentation inhérente au processus de patrimonialisation.

Ainsi, l’œuvre patrimoniale, l’objet central de l’enseignement des lettres, si elle est appréhendée comme système de production d’objets sémiotiques secondaires, trouve-t-elle, à l’ère du numérique, une matérialité et une visibilité que sa seule existence livresque tend à occulter.

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